Seules les personnes connues ont les honneurs des médias lors de leurs décès.
Je me suis toujours promis avec notre blog, de rendre justice à nos proches, inconnus pour la majorité, mais membres de nos familles et de nos amis respectifs, pour qu'eux aussi n'aient pas le droit à l'oubli.
Leurs traces resteront à jamais inscrites pour l'éternité dans nos cœurs et nos mémoires, mais également à la lecture de toutes et tous, ici ou ailleurs grâce à notre blog.
Nous espérons rédiger ce genre de billet le moins souvent possible et pourtant, la vie nous rattrape aujourd'hui tristement à sa dure réalité.
Je pense parler également au nom de ma sœur, Élodie.
Ce 3 août 1923, tu nais dans la famille de Pépé et Mémé Vizioz, ton nom de jeune fille.
Tu as toujours dit avoir du sang bleu, mais je pense que c'est une légende !
Tu es l'aînée de la famille et ta naissance sera suivie de ta sœur Jacqueline, de ton frère François, appelé Franck; qui nous a malheureusement quitté il y a quelques années mais dont nous nous souvenons souvent, et de ta plus jeune sœur, Marie-France, que la vie a voulu rendre aveugle à la naissance en privant également Mémé Vizioz de la vue.
Tu as entre temps rencontré Papy Train, mon grand-père René, dont tu as pris le nom, Longère.
Tu étais un an après la naissance de ta plus jeune sœur, mère à ton tour de ton fils aîné, Guy, ton petit chinois comme tu aimais à nous le raconter car il avait la peau jaune et les yeux bridés.
Quelques années plus tard suivirent mon autre oncle Yves puis ma maman, Annie.
Tu décides de te séparer de mon grand-père au début des années 50 et tu pars alors avec tes enfants en direction de ce petit village qui nous tient tous tellement à cœur, Dareizé.
Tu fais alors la connaissance de la famille Chevalier.
Le père, Pépé Chevalier, Maire du village et sa fille Marie, qui deviendra ma Marraine, vous accueillent chez eux.
Tu feras ta vie ici avec tes enfants.
Tu entameras alors avec Marraine l'accueil d'enfants dont les parents ne peuvent s'occuper de manière temporaire, ou pour d'autres de manière nettement plus longue.
Le mystère de mettre tes enfants en pensionnat durant de nombreuses années, créera une fracture entre eux et toi pour toujours. Une incompréhension restée sans explications : pourquoi accueillir d'autres enfants chez vous que tes propres enfants ?
Guy, Yves et Annie ont grandi, avec cette souffrance qui leur laissera à tous des traces mais qui ne les empêchera pas à leurs tours de vivre leur vie.
Guy se marie à Danièle et tu vois arriver tes deux premiers petit-fils, Éric et Sébastien.
Annie se marie à Jean-Claude, qui accueillent Betty comme leur fille. Ma naissance suivra suivie cinq ans plus tard de l'arrivée de ta première petite-fille et filleule Élodie.
Yves a choisi quant à lui de se marier à Geneviève et de vivre au Canada où ils donneront naissance à ton dernier petit-fils, Grégory.
Ta maman s'éteint quelques temps après ma venue au monde.
Les années passent, je grandis.
Je me souviens des Noëls de famille à Dareizé, des repas entre nous tous à l'occasion des vendanges, des vacances que nous passions en votre présence où lorsque vous partiez, en été au Canada, avec Marraine dont tu partageais la vie, des enfants qui vivaient chez vous et dont je pensais qu'ils étaient tous mes cousins et cousines : Jacky, Anita, Hervé, Isabelle, Jérôme, Saïda, Myriam, Fouzia...
Qu'est ce que je rigolais avec tous ces grands en regardant les séries TV du samedi et du dimanche après-midi.
Tu travaillais à l'époque aux PTT, partie téléphone, et tu étais pour moi Mamie Mouton car tu avais les cheveux bouclés.
Tu avais alors un sacré caractère et lorsque tu ne voulais pas voir les gens tu fuyais dans votre chambre à Marraine et à toi.
Tu lui laissais alors seule le soin d'accueillir les nombreuses personnes qui venaient vous voir.
Tu avais également une vilaine manie : nous faire peur. Maman n'ayant pas le permis, tu nous transportais de Tarare à Dareizé dans ta Simca 1100 blanche ou dans la Simca 1000 de Marraine, en calant dans les montées et en nous disant qu'on allait tomber en arrière !
Ce n'était pas très gentil, mais c'était alors ta personnalité.
Peu de temps avant mon entrée en 6ème, toujours en ce même mois d'août mais de l'année 1985, Marraine, Marie Chevalier, nous quittait laissant toutes ces personnes dans un désarroi et une peine insurmontable.
Presque trente années ont passé et pas un jour depuis je n'ai cessé de penser à elle.
Vous veniez d'acheter votre nouvelle voiture, une Opel Corsa verte pomme.
Nos vies ont alors été entièrement chamboulées et pour ma part j'affrontais pour la première fois la perte d'un être proche.
Moi qui étais si timide, j'ai pris étrangement un peu plus d'assurance et j'ai encore en tête tes paroles d'alors : "On dirait que la force et l'esprit de Marraine sont entrés en lui".
Tu as alors du quitter la maison qui avait vu grandir maman et ses frères, mais également où nous avions passé tant de bons moments. Ce fut un déchirement.
Tu t'es ensuite installée à Tarare dans cet immense immeuble dont les travaux n'ont jamais été terminés.
Ton caractère a alors changé, et tu t'es rapprochée d’Élodie et de moi en jouant ton rôle de grand-mère.
Je déjeunais chez toi en sortant du collège.
Tu as ensuite déménagé au 31 rue Gambetta où lors des mes pauses repas de mes années lycées, nous parlions des actualités, de politique...
Tu aimais aller au restaurant pour les personnes du 3ème âge L'Entraide, où tu as fais de nouvelles connaissances dont la très gentille Madame Gaudet, partie trop tôt.
Pépé Vizioz, ton papa, disparaissait avant d'atteindre son siècle de vie.
L'une de tes passions c'était de manger. Nous t'appelions alors Mamie Boule car tu avais pris du poids.
Je te taquinais aussi pour ta coiffure devenue blanche en disant que tu te coiffais comme Boris Eltsine.
Nous commandions nos livres avec toi à France Loisirs et tu venais régulièrement manger à la maison en apportant ton traditionnel vacherin. Je peux te l'avouer d'ailleurs aujourd'hui, je déteste le vacherin !
Les années passèrent, tu conduisais toujours, souvent en ratant des virages ou des ronds-points nouvellement créés, mais tu disais avoir voulu être chauffeur de rallye automobile.
A 80 ans, tu as décidé de ne plus conduire, c'était un bien pour toi... et pour la société !
Tes petits-enfants ont bien grandi donnant naissance à tes arrières petits-enfants dont tu n'as malheureusement pas trouvé d'intérêt pour tous les rencontrer.
Peut-être que les enfants ne t'intéressaient que lorsqu'ils étaient grands ?
Tu as accueilli Frédéric dans notre famille tout naturellement.
Il y a trois ans, tu ne voulais plus vivre seule et tu commençais à chuter en te déplaçant.
Tu as alors quitté ton appartement pour commencer une nouvelle étape de ta vie en maison de retraite.
La première année, tu participais aux sorties et aux repas même si tu voulais de moins en moins bouger.
Et puis soudainement, tu as décidé de ne plus lire, de ne plus écouter de musique, de ne plus regarder la télévision.
Tu n'apprenais ce qu'il se passait dans le monde réel, que par ce que tes visiteurs te racontaient.
Tu te déplaçais de moins en moins et même à l'occasion de tes 90 ans l'an passé, tu as décidé d'écourter le repas que nous avions donné en ton honneur en réclamant ton lit.
Depuis lors, même si tu mélangeais de temps en temps les générations, tu gardais toute ta tête.
Mais en début de semaine, tu t'es levée dans la nuit, quelle idée toi qui avait décidé de le faire de moins en moins souvent !
L'accident est alors survenu et ce coup du lapin fut fatal pour toi nous plongeant dans une grande tristesse.
Adieu à ma Mamie,
Adieu à notre Mamie.
4 commentaires:
Merci pour se bel hommage
Mes sincères condoléances à toute la famille.
Merci Richard . Tu passes quand tu veux .
Merci à toi Raphaêl
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