Cabaret

Pour faire une pause dans notre chantier de plomberie, nous nous sommes rendus à la Maison de la Danse

8 Avenue Jean Mermoz dans le 8e arrondissement. Depuis Villeurbanne, le trajet est assez long en transports en commun mais cela se fait quand même. 

La 14e édition du Festival Ecrans Mixtes, le Festival de Cinéma Queer de Lyon et de la Métropole

s'est en effet associé avec la Maison de la Danse qui occupe ce bâtiment depuis 1992. A l'origine, en 1959, la Mairie de Lyon voulait doter le 8e arrondissement d'un ensemble administratif et culturel. A la fin de sa construction en 1968, le bâtiment devient le Théâtre du 8e jusqu'en 1992 où la Maison de la Danse quitte le quartier de la Croix-Rousse du 4e arrondissement dans l'ancienne Salle des Fêtes de la Croix-Rousse lors de son inauguration en 1931. En 1980, la Maison de la Danse s'y installe et le bâtiment est depuis 1992, le Théâtre de la Croix-Rousse.

Si un temps il a été question que la Maison de la Danse déménage ailleurs dans Lyon, elle est restée dans ce bâtiment actuel que nous avons trouvé plutôt vieillissant que ce soit l'extérieur mais également l'intérieur. Les sièges sont par exemple plutôt raides pour un peu plus de deux heures de projection.

Car ce n'est pas un spectacle de danse que nous sommes venus voir mais un film qui date de 1972, Cabaret de Bob Fosse (1927-1987) 

avec Liza Minnelli (1946), Michael York (1942), Joel Grey (1932), Helmut Griem (1932-2004), Fritz Wepper (1941).

Le film est basé sur la comédie musicale Cabaret (depuis 1966) tirée du roman Goodbye to Berlin (1939) du britannique Christopher Isherwood (1904-1986) qui ne cachera pas son homosexualité. Cabaret est d'ailleurs une partie de son histoire personnelle lorsqu'il a vécu à Berlin avant que l'Allemagne ne choisisse un virage extrémiste épouvantable.

Au début des années 1930, Sally Bowles; chanteuse américaine; joue chaque soir dans un club branché de Berlin le Kit Kat Klub. Elle vit dans une pension de famille où arrive un jeune britannique, Brian Roberts. Ils se lient vite d'amitié et Brian commence à fréquenter le Kit Kat Klub et son insouciance où plaisirs, loisirs, musiques, chansons, danses, rythment les nuits. C'est là qu'ils font la rencontre d'un jeune, riche et bel allemand, Maximilian von Heune. La vie de ces trois personnages va être complètement chamboulée...

Cabaret est encore l'un de ces classiques du cinéma que nous n'avions jamais vu. Même s'il a 52 ans et que l'histoire se déroule il y a un peu plus de 90 ans, l'atmosphère fait malheureusement écho à notre époque actuelle. Le film est superbe tant par son image, que par sa bande-originale, par l'histoire et par la mise en relief avec la grande Histoire. Les trois protagonistes vivent en effet sur les cendres de ces Années Folles (1920-1929) où beaucoup préférait vivre au jour le jour plutôt que de suivre l'actualité et de faire face à la réalité. Bob Fosse a su parfaitement faire de nombreuses allusions à la montée du Nazisme en Allemagne qui sont arrivés sournoisement, tranquillement mais qui ont finalement réussi à ancrer leurs idées dans la tête de la population. Durant toute la durée du film, on voit cette ascension des Nazis même si ce ne sont que des parenthèses. Ce sont néanmoins des parenthèses violentes qui montrent combien une société civilisée peut partir dans l'extrémisme le plus radical à tout moment. 

Le Directeur du Festival Ecrans Mixtes a entièrement raison. Il suffit d'un tout petit rien pour que nos Démocraties soient balayées par ces idées qu'on aimerait voir disparaître mais qui ressurgissent inlassablement. 

En 2024, on entend cette petite musique de fond, comme à la fin des années 1920, qui ne cesse d'augmenter de volume. Les exemples ne manquent plus pour admettre que demain va être à nouveau compliqué. 

Car si on critique les montées ou les durcissements des extrémismes partout dans le monde, cette ascension des ces gens qui jouent avec la peur, avec le racisme, avec l'antisémitisme, avec l'homophobie;  ces Poutine, ces Trump, ces Milei, tous ces partis d'extrême-droite qui ont le vent en poupe partout en Europe et dans le monde, ont tous ou vont tous être élus par les électeurs des pays concernés lors de premières élections démocratiques. 

Dans le film, Brian demande à Max ce que les Allemands pensent faire des Nazis. Max lui répond qu'ils les laissent arranger certaines choses mais qu'ils sont sous contrôle. Plus tard, dans une fête de village où se mettent à chanter les Nazis et la population sur la Gloire de leur pays, Brian lui demandera s'ils sont vraiment sous contrôle.

Serons-nous assez sages pour ne pas penser que ces Nazis 2.0 que nous élisons pourront être contrôlés à leur tour ? 

Rien n'est moins sûr...

Restons toutefois optimismes, même si tous les voyants sont au rouge et terminons ce billet, justement avec cette couleur. Ce rideau rouge est en effet celui qui a été utilisé lors des représentation de la comédie musicale Cabaret la Maison de la Danse en 2017.